Jour 294 | Entractes

Pausen

Notre exploration de Munich sous la pluie se poursuit, jusqu'au 20 avril, date à laquelle nous quitterons en direction de Füssen et Schwangau. Quelques jours plus tôt, j'avais trouvé des billets pour un concert au magnifique Bayerische Staatsoper. Nous prenons le billet avec la tarification la moins chère, 8 € par personne pour le Akademiekonzert, dirigé par Robert Jindra, un chef d'orchestre tchèque. On veut simplement vivre l'expérience d'être dans la salle, l'expérience de se rendre à un concert dans la belle ville de Munich. Ce concert aura lieu le 18 avril, date de l'anniversaire de mariage de papa et maman. Ce jour là, je me suis réveillée avec un début de rhume, mais c'était tellement pas le bon moment pour ça ! J'ai dormi toute la journée pour casser mon rhume. Après notre concert, j'avais un second rendez-vous, avec ce chavirant et inoubliable Moldave rencontré deux semaines avant à Düsseldorf. Comme j'ai dit, c'était pas le temps d'avoir un rhume pour ce long-awaited second meeting.

Avant le concert, on se rend en ville. Oui, nous avions l'option d'aller à la célèbre Hofbrauhaus pour vivre la totale. C'était tellement bondé de gens avec des Lederhosen sur le party qui tapent leurs gros mugs sur les tables, qu'on est juste entrées et sorties après avoir fait le tour de cette grande salle dont l'ambiance était tout droit sortie des meilleurs clichés bavarois. C'était pas tant l'idéal pour un souper mère-fille. Dans les jours précédents, nous avions vu des belles rues avec des belles terrasses près de la Frauenkirche. On choisi au hasard le restaurant Andechser am Dom, où on partage un très bon repas et des bonnes bières bavaroises. Bien qu'on le mange un peu à la va-vite parce que nous sommes attendues au concert, on a bien pris le temps de déguster deux mets classiques allemands : un Kaiser Wiener Schnitzel pour moi et un Semmelknödel mit Pilzrahmsoße pour maman. 

Durant tout le spectacle, nous n'avons rien vu. Rien. Mais nous avons tout entendu, c'était l'important. Du haut de notre balcon, nous avions une vue sur la moitié supérieure de l'écran et on n'était même pas proches de voir l'orchestre. On comprend le billet à 8 € pour un concert dans une si belle salle maintenant. La majeure partie du temps, tant qu'à avoir les yeux fixés sur cet écran, je les ai simplement fermés et j'ai porté attention. J'ai essayé de trouver des points de repères dans la musique, des mélodies qui revenaient à quelques reprises, des sons que j'aimais. À un moment donné, une chanteuse d'opéra a accompagné l'orchestre, c'était très beau. Je n'ai pas de connaissances en musique classique et je ne suis pas habituée à en écouter, ce qui fait qu'à mon oreille, il ne s'agissait que d'une seule et même pièce qui a duré 3 heures avec entracte. Je ne sais pas comment on arrive à devenir plus réceptif à la musique classique et à comment elle est conçue et jouée. Papa était bon là dedans, il écoutait ça et il appréciait beaucoup.

L'impressionnant Bayerische Staatsoper, l'un des plus prestigieux opéras du monde, construit dans les années 1700.

Max-Joseph-Platz, en face de l'opéra.

Maman, qui avait au hasard choisi un chandail de la même couleur que les murs de l'opéra.

La salle de l'opéra, vue du tout dernier étage du balcon.

On reprend le U, direction Furstenried. Il est temps de rejoindre mon deuxième programme de la soirée : Andrei. Comme à l'habitude, j'ai avisé tout mon entourage du lieu et de la personne que je rencontrais. Personne ne s'est inquiété pour moi, mais tout le monde se demandait ce que j'avais fait avec maman ! Du calme, maman avait accepté que j'aille à mon rendez-vous et elle avait contacté Maïté pour avoir un plan pour signaler les autorités en cas de disparition. J'ai sauté dans le bus en direction de Solln, rap bavarois dans les oreilles, pour arriver chez lui 15 minutes plus tard. Son sourire. Sa voix. Sa compagnie est confortable comme la première fois. En mode analyse de l'appartement, je remarque que c'est propre, décoré avec goût et il a un poêle à bois. Fait indiscutable à noter : même à plein régime, le poêle n'arrivait clairement pas à être aussi chaud que lui. On parle en toute aisance, sans filtre, très ouvertement. Le dating international, c'est savoureux. À travers quelques mots en allemand, en russe et en roumain, j'ai droit à une démo de dvojnice, une genre de flûte double des Balkans, qu'il maîtrise très bien. Musicien en plus ? Surprise ! Je suis conquise. Ce gars là mérite tout l'intérêt pour sa personnalité, son intellect, son Ausstrahlung et le fait qu'il est vraiment grounded. Tellement grounded qu'il est venu me reporter en voiture à l'appart vers 2h, et je cite : parce qu'il faut que je prenne mon café tranquille demain matin avant d'aller au travail. Je n'ai jamais autant voulu me transformer en café tranquille qu'à cet instant. Anyway, quelques minutes après, on a pas mal perdu le ground dans l'auto, stationnée à côté des installations de tri de bouteilles dans un vieux parking sale du poste de gaz Aral. Constat, un rétroviseur central, c'est vraiment mal placé quand vient le temps de frencher sans entractes. C'est ainsi qu'on s'est encore dit adieu pour une deuxième fois, en espérant se revoir la semaine suivante lors de mon retour de Berchtesgaden. Autrement, il aura été un beau souvenir passager de Munich. À ce moment, sans le savoir, j'ai aussi dit adieu à ma belle gourde d'eau fleurie offerte en cadeau par la maman de Maïté au dernier Noël, que j'ai malheureusement laissée sur le siège passager. J'y ai peut-être aussi laissé mon rhume aussi, mais pas sur le siège passager, direct dans gorge ! Es tut mir leid, Andrei. 

Dans chaque ville où je vais, j'utilise le site web Atlas Obscura, un répertoire des choses inusitées à voir dans les villes. À Munich, le site affichait une trentaine de suggestions, dont la Herz-Jesu-Kirche, une église catholique construite en 2000 qui est faite d'un cube de bois dans un cube de verre. Elle n'est pas située dans un quartier touristique, il aurait été difficile de tomber dessus par hasard. Lors des grandes célébrations, toute la devanture de 46 x 59 pieds s'ouvre à l'aide d'un système hydraulique, mais le reste du temps, on peut y entrer par la petite porte taillée dans la grande porte. Si on s'approche de sa devanture en verre et qu'on porte attention au motif représenté, on remarque que ce sont des milliers de clous.

Herz-Jesu-Kirche, qui ressemble à tout sauf une église.

Le corridor entre le cube de verre et le cube de bois.

Le lobby, entre le cube de verre et le cube de bois.

L'intérieur de la Herz-Jesu-Kirche avec son orgue sur la mezzanine. 

Vue rapprochée de la devanture, composée de centaines de milliers de clous disposés de façon aléatoire.

Détails du quartier autour de la Herz-Jesu-Kirche.

Pour notre dernière journée à Munich, sous la pluie battante, nous avons visité le MUCA, le Museum of Urban and Contemporary Art. Nous y avons découvert une galerie un peu underground, avec une collection de street art dont certaines œuvres ne m'ont pas du tout rejoint, alors que d'autres méritaient qu'on s'y attarde. Un peu comme dans toutes les visites de musées, en fait. L'exposition mettait en lumière, entre autres, des thèmes comme l'art dans l'espace public et l'art engagé. Vandalised Phone Box, la cabine téléphonique londonienne vandalisée de Banksy était bizarre. En 2006, cet objet iconique est apparu dans une rue du quartier populaire de Soho, à Londres, complètement déformée, avec une hache coincée dedans. Elle a été retirée de la rue aussi rapidement qu'elle y est arrivée, par les autorités. Rien n'est certain avec Banksy, toutes les interprétations ne sont que des maybe. Cette œuvre peut être vue comme une métaphore de la pertinence décroissante de la Grande-Bretagne moderne ou de la mort des anciennes formes de communication dans l'ère du numérique. Personne ne sait. Intéressant, mais pas impressionnant. Mon avis sur le MUCA est plutôt neutre, je suis restée sur mon appétit. 

Graphisme réussi de propagande positive.

La Vandalised Phone Box, de Banksy.

De près, cette immense toile n'a l'air que d'une disposition aléatoire de couleur à l'aide d'aérosol, mais plus on s'en éloigne, plus on distingue qu'il s'agit en fait d'un visage flou. Magnifique. Réussi.

Art engagé français.

Une œuvre réalisée avec l'aide de Rubik's cube soigneusement placés.

Girl with Balloon, de Banksy.

Notre semaine à Munich était tellement simple, agréablement pas trop chargée, juste assez variée. Le soir, on allait à l'épicerie en face de notre station de métro, on faisait quelques courses, et on cuisinait des choses simples. Du spaghetti, des poutines, du riz au poulet, du saumon. C'était tellement plaisant de cuisiner avec maman. Cuisiner à deux et pour deux, c'est toujours mieux. Ça va beaucoup me manquer, je sais. Ça fait déjà deux semaines que maman est ici et je m'habitue vite à un peu de compagnie, surtout celle de maman.

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