Wildnis Trail - Die zweite Etappe
Au réveil à Einrurh, on déjeune au gruau canneberges et noix et on se prépare tranquillement à partir. La température est prometteuse pour cette deuxième journée de marche dont l'objectif est à Gemünd, à 20,5 km d'ici. Le trajet d'aujourd'hui prévoit beaucoup plus de dénivelé que celui d'hier. J'ai déjà mal aux chevilles. Mes bottes sont neuves et un peu raides à cet endroit. J'ai du faire un petit ajustement maison : un coussin avec du papier essuie-tout qui me suivra pendant tous ces kilomètres à venir.
La randonnée nous en mets plein la vue, beaucoup plus que celle d'hier. D'abord, on longe la paisible rivière Rur, sur laquelle se promènent des canots et des petits bateaux de croisière. La Rur rencontre le barrage Urftstaumauer, puis devient l'Urft, 58 mètres plus haut. En plein milieu de la forêt se trouve cette énorme construction humaine complètement inattendue. Le barrage, qui fait 226 mètres de long, a été construit entre 1900 et 1905 et a été pendant 7 ans le plus haut barrage de toute l'Europe. Sur les photos historiques affichées à proximité, on pouvait voir qu'un chemin de fer avait été créé à partir du village de Gemünd pour transporter les hommes et le matériel spécialement pour sa construction. Durant la seconde guerre mondiale, le barrage a été la cible d'attaques aériennes ayant causé de sérieuses encoches dans le mur du barrage, lesquelles ont été réparées entre 1945 et 1950. Entre temps, la zone faisait partie d'une zone d'entraînement militaire et était totalement inaccessible au public. Ce n'est qu'en 2005, lors du retrait des troupes, que le Urftstaumauer a rejoint le parc national de l'Eifel, récemment fondé l'année précédente. Même ce barrage, qui pourrait être totalement banal, regorge d'histoire.
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Vue partielle sur le barrage Urftstaumauer, autrefois l'une des plus grandes constructions d'Europe. |
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L'une des quelques tours très profondes qui permettent de mesurer et de contrôler le niveau de l'eau. |
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C'est à partir de là que s'écoule l'eau entre le réservoir de l'Urft et la Rur, dirigée vers les immenses marches qui ressemblent à un escalier géant en pleine forêt. |
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Point de vue dégagé sur la rivière Rur. |
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Au départ de la deuxième étape de la randonnée, à Einruhr.
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Quelques kilomètres plus loin, on a croisé une étonnante curiosité : le village abandonné de Wollseifen. S'y trouvaient à l'époque 120 familles réparties dans 111 maisons. Ces familles vivaient d'une agriculture modeste et d'élevage. La construction du barrage Urftstaumauer a également créé quelques emplois à l'époque. Or, en 1946, les militaires britanniques ont ordonné à ces familles d'évacuer dans un délai de trois semaines, car ils voulaient utiliser le site pour une zone d'entraînement. Les habitants ont été amenés dans des abris d'urgence ou hébergés chez des familles dans les villages avoisinants. Ils retournaient de temps en temps à leur demeure, malgré la réglementation imposée par les britanniques, avant que ce ne soit rendu complètement impossible parce que les maisons étaient désormais utilisées comme cible pour l'entraînement au tir. Les fermes ont été progressivement détruites, de même que tous les autres bâtiments, à l'exception de l'église et de la petite école, que nous avons pu visiter. Il n'en est plus rien aujourd'hui du village de Wollseifen, alors qu'il avait pourtant survécu à la guerre. L'église Pfarrkirche St. Rochus a brulé en 1947, entraînant la perte de toute la décoration intérieure.
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Ce qu'il reste de l'église Pfarrkirche St. Rochus, construite entre 1633 et 1635. |
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Comme le témoigne la photo suspendue au dessus de la porte, les jeunes filles du village de Wollseifen avaient un quotidien bien normal avant que celui-ci ne soit troublé par les activités britanniques. |
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Wollseifen autrefois. Les bâtiments foncés sont ceux qui sont toujours en place. |
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L'église Pfarrkirche St. Rochus, dans toute sa modestie. |
Quelques pas plus loin, nous arrivons à Vogelsang. Alors que nous pensions que Vogelsang était un petit village, il en était vraiment tout autre. Aujourd'hui appelée Vogelsang Internationaler Platz, c'était autrefois une ancienne forteresse de l'Ordre nazie, nommée NS-Ordenburg. Encore un autre ouvrage architectural majeur érigé sous le régime national-socialiste. Les bâtiments se dressent comme ça, au beau milieu d'un grand territoire naturel, avec rigidité et mépris envers le genre humain. En 1934 est posée la première pierre de ce lieu destiné à la formation des futurs dirigeants du parti. Deux ans plus tard, les formations débutent et sont ensuite interrompues en raison du début de la deuxième guerre mondiale en 1939.
L'ensemble Vogelsang s'étend sur 1,2 km et sa tour panoramique représente une montée de 172 marches. Malheureusement, en raison d'un encore grand nombre de kilomètres à parcourir, nous ne nous sommes pas aussi attardés que nous l'aurions souhaité. On était tous les deux très curieux de lire un peu plus à ce sujet en arrivant le soir dans notre hébergement. Étant donné que c'est quand même tout près de chez moi, je n'écarte pas l'idée d'y retourner un jour pour en apprendre d'avantage. Ça mériterait, d'après moi, une journée complète pour bien s'immerger de l'histoire qui y est racontée. Une visite est même proposée en français. Le bus SB68 s'y rend tous les jours à partir du Bushof d'Aachen, qui est lui-même à 1h15 de Düsseldorf.
L'orientation qu'a pris aujourd'hui Vogelsang IP mérite beaucoup d'attention. Si l'on veut comprendre comment les plus grands crimes de l'histoire se sont produits, on doit se pencher sur les hommes de cette époque, leurs convictions, leur caractère. J'ai lu que l'exposition en place ne vise pas à fournir des réponses, mais bien à faire naître un questionnement. Qu'est-ce qui rendait ce lieu attractif à l'époque du national-socialisme ? Quelles sont les promesses qui étaient faites aux jeunes hommes ? Étaient-ils en mesure de dire non où étaient-ils prédestinés à prendre part aux crimes commis dans les années qui ont suivies ? C'est ainsi qu'on se demande nous-mêmes comment nous aurions pu penser et agir si nous avions vécu à cette époque.Aujourd'hui, le centre de documentation participe à la recherche et à l'archivage des connaissances relatives aux forteresses de l'Ordre. Outre Vogelsang, les deux autres sont Krössinsee, dans la Pologne actuelle, et Sonthofen en Bavière.
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Une partie de Vogelsang IP, autrefois une forteresse de l'Ordre nazie destinée à la formation de la future élite du parti. |
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Bâtiment rigide et sombre, digne de son époque.
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On mange sur une table pas très loin de Vogelsang et on continue notre chemin vers Gemünd. Encore une fois, le chat sauvage qui nous indique le chemin nous dit de prendre le détour qui indique Gemünd : 9,8 km, alors que le chemin opposé indique Gemünd : 1,2 km. Satané chat. En arrivant au village, on trouve rapidement l'information touristique à qui on demande où se trouve le départ de la troisième étape, puis on se ravitaille chez Netto, épicerie de pauvres, pour se cuisiner des pâte Carbonara le soir dans notre logement. Comme si ce n'était pas assez, on doit encore faire 2,3 km pour se rendre chez Tom's Gästehaus, à Nierfeld, un village voisin de 440 habitants. C'est parfait chez Tom ! On a une chambre dans une maison complète et nous avons accès à toute la cuisine et la terrasse, qu'on partage avec d'autres invités, et l'hôte lui-même. Tom est un gars timide, mais très accueillant, qui nous a laissé tout l'espace, au grand bonheur de Fred qui avait envie de tout sauf de jaser ce soir là. Un bon cuistot ce Fred. On a mangé nos délicieuses pâtes en compagnie de Sally, la petite chatte bien sociable qui habite la place. Tout est
on point chez Tom. Tout est propre, tout est bien indiqué, tout est pensé pour une arrivée autonome, on n'a besoin de rien. C'était vraiment un de mes hébergements préférés. On voit vraiment qu'il a bien organisé son offre au fil des années. Ça m'a rassurée et ouvert la porte à chercher ce type d'hébergement, notamment lors de mon voyage à Londres à la fin du mois de juin, si je ne veux pas qu'il me coûte une beurrée.
Après une douche glaciale pour les jambes et les pieds, je suis une nouvelle personne. Je m'endors assez tôt pendant que Fred chill dans son petit fauteuil en osier. Demain, on s'en va à Heimbach.
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