Jour 395 | Une pensée pour mamie

Ein Gedanke für Oma

Mamie Gemma nous a quitté plus tôt cette année, le 4 mai. Au moment où j'ai reçu l'appel de maman, j'étais sur le chemin du retour d'une belle randonnée au soleil dans les montagnes d'Innsbruck. Pendant que j'appréciais le sol, les arbres, le ciel bleu, les odeurs et les sons de la nature à l'endroit où je me trouvais sur la planète, mamie, elle, quittait notre planète vers son prochain chez-soi. Et même après son départ, le sol, les arbres, le ciel, les odeurs et les sons étaient encore là, c'était toujours très beau. Ça m'a fait réaliser, un peu comme dans les heures qui ont suivi le décès de papa, que la vie demeure précieuse même après le départ de quelqu'un de précieux. Imaginer que mamie et papa ne peuvent plus avoir accès au sol et au soleil comme moi j'y ai accès, me fait encore plus apprécier le fait d'être où je suis. Pour eux.

Les funérailles se tenaient le samedi 29 juillet à Rimouski. Évidemment, je ne pouvais pas être présente, mais j'avais préparé quelque chose de spécial pour pouvoir me recueillir, à ma façon. Après avoir salué le beau et sympathique allemand qui s'est réveillé en cuillère à côté de moi ce matin là, j'ai pris le train en direction de Königswinter, un petit village riverain voisin de Bonn. Pourquoi là spécialement ? Parce que s'y trouve le château de Drachenburg, et ses jardins me semblaient bien jolis pour aller y faire une promenade lors de la journée à mamie. Je me suis endormie, réveillée, endormie, réveillée, endormie, réveillée, à chaque arrêt entre Düsseldorf, Köln, Koblenz et Königswinter, toujours en panique en me disant fuck j'ai manqué mon arrêt ! 

Le château de Drachenburg ou, en français, le château du dragon.

Les jardins du château comptent de très grands et vieux arbres.

L'entrée principale du château, avec des arbres magnifiques, tous identifiés par des petites plaques dans la pelouse. J'ai même trouvé un Kanadische Hemlocktanne (Pruche du Canada)

Sculpture prestigieuse en face de la fontaine des jardins.

Vue du Rhin à partir de la tour Nord.

Promenade colorée.

Façade du château.

Ce château est assez récent. Il fut construit en 1882 et édifié dans un temps record de deux ans seulement. Juste un ti peu plus rapide que la réfection de la Cathédrale de Rimouski. Son style, ou plutôt ses styles, sont inspirés de différentes époques, ce qui fait de lui un château assez unique. Un bourgeois de la ville de Bonn qui avait fait fortune grâce à la spéculation boursière avait commandé sa construction et ne vécu finalement jamais dedans. Le château eut ensuite toute sorte d'usage, jusqu'au jour où il fut sérieusement endommagé par les bombardements et les combats de la deuxième guerre mondiale. La façade porte encore des marques de cette époque. La coupole centrale a été détruite, de même que l'essentiel des vitraux. Seule la belle rosace arborant l'aigle allemand est demeurée intacte et est encore bien mise en valeur au dessus du superbe escalier central. 

Le seul et unique vitrail d'origine, avec l'aigle allemand en son centre.

Les vitraux colorés qui laissaient passer la lumière dans la galerie d'art.

L'une des nombreuses fresques, dans la cage d'escalier.

Je n'étais pas pressée cette journée là, je devais simplement être au village vers 17h, heure des funérailles de mamie sur mon fuseau. Pour 8 €, j'ai accédé aux jardins, j'ai visité l'intérieur du château et j'ai grimpé au sommet de la tour Nord. Comme toutes les autres journées dans le NRW depuis le début du mois, il pleuvait. Il pleut tout le temps. Tout le temps. Mais, conséquemment, il n'y avait pas foule au château de Drachenburg. Parfait ! J'ai visité chacune des pièces, arpenté tous les sentiers et regardé chaque point de vue, avec mon audio-guide en français disponible sur une application sur mon cell. J'ai trouvé ce château beaucoup plus beau que le château de Schwerin, que j'avais visité en novembre dernier. L'ameublement des pièces étaient vraisemblables, comme si j'étais à une porte ouverte d'une maison affichée sur Centris. À un moment, j'ai même trouvé un petit banc, reculé dans un creux de la forteresse, où je me suis assise pour prendre mon lunch et regarder les bateaux naviguer sur le Rhin. Personne n'est passé devant mois dans toute l'heure. J'étais seule, comme toujours, et bien, comme toujours. 

Vue en hauteurs sur le Rhin.
 
Seule, comme toujours.

Le petit banc, dans un environnement calme et en retrait, dans la forteresse du château, sur lequel j'ai laissé une lettre pour papa, avec la vue sur le Rhin.

La bibliothèque du château, réservée autrefois pour les hommes, parce que la culture et l'instruction n'étaient pas accessible aux femmes à l'époque.

Là où se tenaient des meetings de bonhommes. 

L'une des pièces du château était dédiée à la musique. Un orgue impressionnant se trouvait sur la mezzanine, mais ce n'était même pas un vrai. L'hôte mettait des chansons sur speaker pour faire croire qu'il jouait de l'orgue et il recueillait quand même les applaudissements de ses invités. Wannabe organiste, và !

Gentil tapis au pied du lit, dans la chambre des maîtres. 

La fenêtre de la chambre d'amis.

Jolis détails de la tapisserie dans la chambre des invités.

Alors que l'heure des funérailles de mamie approchait, je prépare ma playlist, celle qui allait jouer à la cérémonie, et je descends au village de Königswinter, à pied, dans le but de trouver une petite église calme pour me recueillir au même moment que ma famille. La Christuskirche était verrouillée, et St. Remigius était en rénovation. Pas de chance. Mais j'ai trouvé bien mieux. Je suis allée tout au bord du Rhin, ce fleuve que j'aime. Mon préféré. Lui qui coule aussi à Düsseldorf et que je vois tous les jours. J'ai trouvé un beau banc entouré de fleurs, j'ai regardé l'heure, 17h05, et j'ai pensé à maman qui s'apprêtait à vivre les funérailles de sa propre maman, sans avoir papa à ses côtés. Ouf, tout ça en si peu de temps. 

Alors que je mangeais mon ti pain aux bananes dans la plus grande sérénité, une grosse averse est arrivée et tout le monde autour a déserté à la course. Mais pas moi ! Je suis restée là, sous la pluie chaude, les jambes, les bras et le visage non couverts. Je regardais le ciel tout gris et j'avais la pluie dans les cheveux, dans le front et sur les joues. Et je souriais, parce que je n'avais rien d'autre à faire, et que tout le monde s'en fout anyway de ce que j'ai l'air, à sourire sous la pluie. Pourquoi faudrait-il que je m'abrite ? Ça ne fait pas de mal la pluie, ça fait vraiment du bien. Ich bin nicht aus Zucker, oder ? Je suis tellement chanceuse. Rien ne m'empêche d'être bien ici. Si c'est pas ça le bonheur, je suis pas trop trop loin. 

Alors, j'ai une pensée pour toi mamie, qui est quelque part près de papa. Merci de contribuer à toute cette beauté toi aussi maintenant. C'est beaucoup trop beau, votre œuvre à tous les deux.

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