Jour 779 | Le Nid d'Aigle

Das Kehlsteinhaus

Le Nid d'Aigle (Eagle's Nest ou Kehlsteinhaus) était un lieu de retraite et de relaxation qui ressemblait un peu à un chalet dans un paysage idyllique commandé par Hitler en 1936. C'était un lieu où le statut politique pouvait être affiché à l'abri des regards du peuple. Le panorama sur les alpes bavaroises à partir de la montagne Kehlstein servait de toile de fond. Hitler y a reçu des invités influents et des représentants des médias pour y tenir des conversations confidentielles et de haute importance. Il a passé la plupart de son temps dans les mois de juillet et d'août 1939 dans la région pour planifier l'invasion de la Pologne, dans sa deuxième résidence, le Berghof, à Obersalzberg, à quelques kilomètres de là. La Kehlsteinhaus, située 800 m au dessus de Berchtesgaden, à 1834 m d'altitude, est à ne pas confondre avec le Berghof, qui n'existe plus aujourd'hui. Pendant qu'il prenait le thé au Berghof et que ses invités appréciaient les beautés de la nature à partir de la Kehlsteinhaus, des crimes étaient commis ailleurs. Crimes qui ont été planifiés et décidés dans ce paisible environnement devenu aujourd'hui un site touristique et historique populaire. En 1952, le Berghof fut dynamité par le gouvernement allemand afin d'éviter que ceci ne devienne un lieu de pèlerinage pour les nostalgiques de l'époque du national-socialisme. On y trouve maintenant le centre de documentation d'Obersalzberg.

La croix au sommet de Kehlstein, à quelques pas de la Kehlsteinhaus.

Je quitte Salzburg très tôt ce matin pour m'y rendre. J'ai eu un lever de soleil extraordinaire à partir de ma chambre. Le bus passe à 8h et me dépose à Berchtesgaden, en Allemagne, une heure plus tard. Je suis venue ici avec maman, en avril l'année dernière. On était arrivée dans cette ville le 22 avril, le jour de la fête de papa et c'était l'une des seules journées de soleil depuis le début de notre voyage. On a tellement fait un beau séjour ici ! J'ai plein de souvenirs rattachés à Berchtesgaden, Schönau et le Königssee. Un premier bus m'amène au centre de documentation d'Obersalzberg, là où partent les navettes pour la Kehlsteinhaus. Oui, on peut monter à pied (par la montagne, pas par la route), mais je suis encore raquée de mon escalade trois jours après. Navette ce sera.

La Kehlsteinstraße a été construite en 13 mois et traverse cinq tunnels dans la montagne, principalement sur le versant nord. Cette route n'est accessible que pour les bus et est fermée au trafic. Le bus était tellement plein et forçait tellement dans les pentes qui allaient jusqu'à 24 % d'inclinaison que je me suis demandée si on allait s'y rendre. Le bus s'arrête à côté d'une falaise dans laquelle est aménagé un portail, qui est en fait l'entrée vers un long tunnel dans la montagne, au bout duquel se trouve un ascenseur de 124 m de haut, dont la cabine est recouverte de miroirs et de laiton poli. C'est trop bizarre d'emprunter le même chemin que ces gens qui venaient ici pour prendre le thé tout en organisant des crimes contre l'humanité quelques dizaines d'années plus tôt.

La vue de ma fenêtre de chambre.

Lever de soleil de toute beauté derrière la colline Gaisberg.

Le portail d'entrée au tunnel dans la montagne, construit en 1938.

L'entrée du tunnel et la Kehlsteinhaus, juste en haut.

Le même lieu que la photo précédente, en 1945.

Le tunnel vers l'ascenseur.

Je n'ai pas été en mesure de prendre de photos dans l'ascenseur, car on était empilés les uns sur les autres, mais c'était ça. La cabine est en grande partie d'origine, incluant un téléphone mural et une horloge mécanique.

La visite n'est pas du tout historique, à l'exception d'une petite collection d'environ une trentaine de photos et des explications sur l'histoire du lieu, que tout le monde ignorait au passage. Ils sont venus boire et manger au restaurant. J'ai trouvé ça un peu dommage. L'ambiance n'était pas du tout orientée vers l'histoire, même pas un peu. J'ai entrepris la courte randonnée au sommet, pour profiter un peu du paysage, mais on pouvait voir que même les roches étaient usées à la quantité de gens qui y circulent. En résumé, je n'ai pas eu le souffle coupé par cette visite, car elle n'a pas répondu à mes attentes en matière d'apprentissage. Ce n'est qu'après avoir lu à ce sujet, en dehors de la visite elle-même, que je suis impressionnée d'avoir mis les pieds dans un lieu pareil.

Une partie de l'exposition de photos.

L'intérieur du bâtiment, qui était autrefois le hall de réception principal.

Le hall, autrefois.

On peut comprendre le choix du lieu par Hitler, quand on voit ce genre de paysage à 360 degrés.

La Kehlsteinhaus.

Le sommet de Kehlstein, bien bondé.

Un beau passage entre les rochers lors de la randonnée.

J'ai un dernier arrêt à faire avant de retourner en Autriche pour prendre mon vol. Ramsau. Je l'avais manqué la dernière fois que j'étais dans le coin. Maman et moi on était allées voir l'église de Maria Gern à la place. Qu'est-ce qu'il y a de particulier à Ramsau ? Avant de partir du Québec, j'avais acheté un guide touristique sur l'Allemagne, que j'ai épluché de A à Z. En page couverture de ce guide que j'avais toujours avec moi, au bureau ou à la maison, se trouvait une petite église de village. C'était l'église de Ramsau, Pfarrkirche St. Sebastian. Je m'y suis rendue, plus de deux ans après être arrivée ici. Je l'ai vue de mes propres yeux. J'étais dans ce paysage photographié que j'avais si souvent regardé. Je suis descendue de l'autobus avec dans les oreilles une chanson que j'écoute lors de moments importants. J'ai marché sur le pont sur la photo, traversé la rue et je suis entrée dans l'église. Une petite église bien modeste. J'ai acheté sur place un petit lampion en verre avec l'image de l'église. Ce sera le mien. Je le ramène à la maison. Je le ferai brûler pour papa quand j'en aurai besoin. J'en ai d'ailleurs aussi allumé un sur place, pour lui dire que j'étais bien rendue. Que mon voyage se termine bientôt et que j'ai vraiment vu ce que je voulais voir, et vécu ce que j'avais à vivre. Et même un million de fois plus.